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LES ARMOIRIES. LECTURE ET IDENTIFICATION

par Emmanuel de Boos

Nouvelle édition en ligne

Deuxième partie : L’identification d’une armoirie
4. Consultation des instruments d’identification : armoriaux et tables héraldiques

Armorial ordonné de Thomas Jenyns – livre de la reine Marguerite : début du chapitre consacré aux lions. Londres, British library, add. 40851

Armorial, n. m. : recueil d’armoiries peintes, dessinées ou blasonnées.
Armorial général, loc. : armorial recensant en principe toutes les armoiries originaires d’une zone géographique donnée.
Armorial ordonné, loc. : armorial dans lequel les armoiries sont classées par figures.
Table héraldique, loc. : index alphabétique de figures héraldiques accompagnant un armorial, destiné à identifier une armoirie anonyme.

Très tôt, les hérauts d’armes, puis les héraldistes, ont cherché à élaborer des outils permettant de retrouver rapidement le nom d’une famille ou d’un personnage dont on connaissait l’armoirie. Pour ce faire, les hérauts ont ordonné par figures, d’une matière généralement très fruste, les armoiries des recueils ou armoriaux qu’ils composaient. Ces armoriaux ordonnés, qui apparaissent au XIVe siècle, sont souvent anglais. Les tables héraldiques du type de celles que l’on pratique aujourd’hui remontent seulement au XIXe siècle. À cette époque, les héraldistes, conscients de l’insuffisance des tables des noms de famille jusqu’alors présentées, entreprennent de compléter celles-ci par une table des figures.

Les rubriques des tables héraldiques renvoient généralement aux figures principales. Les meubles annexes déterminent des sous-rubriques. Les couleurs ne sont pas toujours utilisées dans le classement. En fait, la présentation des tables varie considérablement selon les auteurs. Bien souvent, les tables héraldiques sont des index ne reprenant pas dans chaque rubrique la description complète des armes. Le chercheur doit alors se reporter au nom, dans le corps de l’ouvrage. D’autres tables, plus autonomes, donnent le blasonnement entier et le nom de la famille, mais on a toujours avantage à se reporter à la notice de référence qui apporte des renseignements complémentaires.

Les quelques ouvrages analysés ci-après constituent un échantillon assez représentatif. En raison de cette diversité, il est recommandé de lire attentivement le préambule des index avant d’en entreprendre la consultation.

RIETSTAP (J.-B.), Armorial général…, 2e éd, Gouda, G.-B. van Goor Zonen, 1884-1887. Table héraldique : RENESSE (T. de), Dictionnaire des figures héraldiques, Bruxelles, Société belge de librairie, 7 vol., 1894-1903. Réimp. en 1 vol., Bruxelles, 1992.

C’est l’instrument le plus complet conservé dans la plupart des grandes bibliothèques. Il présente malheureusement de graves insuffisances. Malgré les 110 000 armes recensées, il est loin d’être exhaustif. De plus, il ne prend en compte que le dernier état d’une armoirie. La table est en outre d’un maniement peu commode :

  • les armoiries ne sont mentionnées qu’une seule fois, à la rubrique de la figure la moins fréquente en héraldique (les indices de fréquence ajoutés au glossaire du présent ouvrage aideront le lecteur à surmonter cet obstacle).
  • les chapitres des sept volumes sont agencés de manière confuse et il faut consulter la table générale des figures placée à la fin du tome 7.
  • les armoiries ne sont pas blasonnées entièrement. Il est donc préférable de vérifier le résultat de la recherche dans l’armorial de Rietstap.

Pour chaque chapitre de la table, Renesse a adopté le plan suivant :

  1. Armoirie « complète »
    1. Figure seule
    2. Figure chargeant partitions ou pièces
    3. Figure brochant
    4. Figure accompagnant pièces et meubles
  2. Armoirie « non complète » (c’est à dire comportant trois figures ou plus)
    1. Figure chargeant partitions ou pièces
    2. Figure brochant sur partitions et pièces
    3. Figure accompagnant pièces et meubles
  3. Armoirie écartelée
    1. Figure chargeant partitions ou pièces
    2. Figure brochant sur partitions et pièces
    3. Figure accompagnant pièces et meubles

Ainsi, un écu d’argent à la fasce de gueules chargée de trois trèfles d’or sera classée au chapitre des trèfles dans la rubrique 1-ii.

Les ouvrages de Rietstap et Renesse concernent l’Europe entière. Pour la France, aucun répertoire national n’a fait l’objet d’une table héraldique. Il faut déplorer cette lacune pour l’ouvrage fondamental de H. Jougla de Morenas (et alii), Le Grand armorial de France, Paris, 1934-1952, 7 vol. : réimpr. 1975.

Il vaut donc mieux se tourner vers les ouvrages régionaux. Chaque province de l’Ancien Régime en possède au moins un. Ils ont souvent été composés au XIXe siècle. Leur qualité est inégale et rares sont ceux qui possèdent une table héraldique (voir la bibliographie). Certaines régions sont mieux pourvues que d’autres. En règle générale, l’identification d’une armoirie est plus facile pour la France du nord que pour celle du sud et pour le Moyen Âge que pour l’époque moderne.

E. de BOOS, Marches d’armes. Vol. 3 : Berry, Paris, Le Léopard d’Or, 1989.

Pour la période médiévale, la collection « Marches d’armes » (éd. Léopard d’or) propose les tables héraldiques d’une vingtaine d’armoriaux manuscrits. La plupart des armoriaux sont présentés par région. Les armes sont classées par ordre alphabétique des figures principales, les figures annexes n’étant généralement pas répétées. Chaque armoirie est cité intégralement et les couleurs sont prises en compte dans le classement.

En l’absence de table héraldique, il est long de retrouver le possesseur d’une armoirie, car il faut consulter in extenso l’armorial provincial concerné. Dans le meilleur des cas, l’ouvrage est illustré ce qui permet une consultation relativement rapide.

En règle générale, une armoirie composée est plus aisée à identifier (sauf les écartelés), alors que l’armoirie simple ne permet souvent que des identifications incertaines. En effet, l’armoirie simple peut être portée par plusieurs familles sans lien de parenté et une identification précise ne peut être déterminée sans l’aide d’éléments annexes, para-héraldiques ou de sources particulières.

Parmi les écus simples, plus le nombre des figures est réduit et plus la nature de celle-ci est banale, moins il est facile de parvenir à une identification.

Ainsi, il est presque impossible, sans disposer de sources complémentaires, d’identifier une famille portant une armoirie aussi courante que de gueules au lion d’argent, de gueules à la fasce d’argent, d’azur à la croix d’or ou de gueules à la bande d’or.

 

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