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Comptes rendus de lecture
Giulio ZAMAGNI, Il valore del simbolo. Stemmi, simboli, insegne e imprese degli Ordini religiosi, delle Congregazioni e degli altri Istituti di Perfezione, Cesena, 2003.
Les publications concernant l’héraldique religieuse sont suffisamment rares pour que mérite d’être signalé l’ouvrage de Giulio Zamagni. Plus qu’un armorial, ce recueil se propose de recenser tous les emblèmes utilisés par les ordres religieux, congrégations et autres institutions à vocation spirituelle constitués au sein de l’Eglise catholique. Précisons d’emblée que la langue italienne dans laquelle est rédigé l’ouvrage n’est guère un obstacle pour le chercheur, qui pourra se guider à la fois par un index aisé à traduire et une iconographie foisonnante.
Chaque notice s’ouvre sur une représentation de l’emblème, souvent tirée de documents originaux, accompagnée de sa description (héraldique ou non). Suit une interprétation symbolique prudente et un historique concis incluant, le cas échéant, l’évolution de l’emblème considéré. Seize planches en couleur viennent compléter le tout. On peut regretter que la bibliographie soit renvoyée en fin d’ouvrage : les notices auraient gagné en force et en clarté si la liste des sources et la bibliographie consultées avaient systématiquement clos chaque notice.
Cet ouvrage, commode de consultation, rendra bien des services. Il faut en effet reconnaître combien était ardue la tâche qui consistait à rassembler en un recueil des informations difficilement accessibles, extrêmement dispersées, souvent publiées dans des revues à diffusion confidentielle. Désormais, le chercheur et le curieux auront à portée de main un panorama complet d’une des manifestations les plus originales de l’héraldique. L’œil embrasse ainsi plusieurs siècles d’évolution.
D’incontestables réussites graphiques apparaissent : que l’on songe au mantelé des Carmélites, au cœur enflammé des Augustins, à toutes les variations sur le thème de la croix, dont le somptueux gironné à la croix fleurdelisée de l’un en l’autre des Dominicains… Une des particularités de l’héraldique des ordres religieux est sans conteste la promotion de lettres ou des mots entiers au rang d’emblème, notamment à l’époque moderne : l’IHS des Jésuites ou le CHARITAS des Minimes n’en sont que quelques exemples. Ces compositions, au-delà de leur simple dimension emblématique, se révèlent être de véritables vecteurs de communication théologique, d’une grande efficacité. Ce souci de l’édification spirituelle est une des particularités de l’héraldique ecclésiastique : rarement dans le blason l’emblème et le symbole ont été aussi intimement liés.
Après l’ère des innovations vient celle des accumulations. En regard de leurs aînées, les créations doloristes du XIXe siècle paraissent bien lourdes : ce ne sont bien souvent qu’amas de cœurs mortifiés, de couronnes d’épines sanguinolantes, d’effigies de saints larmoyants. Les tentatives de simplification observées au cours du XXe siècle, si elles sont bienvenues, aboutissent parfois à la conception de logos bien fades.
La longueur des notices de ce recueil est inégale, et il arrive que le lecteur reste sur sa faim. L’auteur ne saurait en être tenu pour responsable : d’une part, un recueil qui se veut le plus large possible ne peut tout dire sur chaque cas ; d’autre part, il reste encore beaucoup de zones d’ombres. L’histoire approfondie de chaque emblème d’ordre est souvent encore à faire, et l’écart constaté entre le rayonnement spirituel de certains ordres religieux et la minceur des travaux que l’étude de leur emblématique a engendré ne manque pas d’étonner. Souhaitons donc que le bel ouvrage de M. Giulio Zamagni suscite de nouvelles réflexions sur le rôle joué par l’emblématique religieuse. Si tel était le cas, ce ne serait pas le moindre des mérites qui s’attacherait à son ouvrage, que tout héraldiste avisé se devra désormais de posséder dans sa bibliothèque.
Nicolas VERNOT
Revue française d’héraldique et de sigillographie, édition en ligne
© Société française d’héraldique et de sigillographie, 2007