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LES ARMOIRIES. LECTURE ET IDENTIFICATION

par Emmanuel de Boos

Nouvelle édition en ligne

Première partie : Les armoiries. Notions générales
2. Éléments constitutifs

Situation des figures sur le champ de l’écu.

L’armoirie, agencée selon les règles du blason, est ordinairement portée par un écu ; elle se compose toujours d’émaux et généralement de figures.

Écu, n. m. : surface délimitée par un périmètre de forme variable, sur laquelle se placent les émaux et les figures.
Champ, n. m. : surface de l’écu. Ce champ comprend différentes régions servant à localiser les figures : le cœur ou l’abîme (A), le chef (B), la pointe (C), le flanc dextre (D), le flanc senestre (E), le canton (F). Dextre et senestre s’entendent par rapport au possesseur de l’écu censé porter le bouclier ; pour le spectateur, dextre est à gauche, senestre à droite.

Différentes formes d’écu.

La forme du contour détermine différents types d’écus. Le plus souvent composé d’un rectangle se terminant en arc brisé renversé, il est dit scutiforme (a), mais il peut aussi être rond (b), ovale (c), en losange (d), carré ou en bannière (e), en targe (f), en cartouche (g), en tête de cheval (h), en accolade (i). L’écu héraldique suit en général au Moyen Âge l’évolution de la forme du bouclier dont il son nom. Avec l’abandon progressif de cette arme défensive, il tend à devenir un motif de pur ornement et, comme tel, est soumis à d’innombrables variantes. Les tentatives faites pour identifier, localiser et dater les armes grâce à la forme des écus n’ont pas abouti à ce jour à des résultats réellement convaincants. On peut noter, toutefois, que l’écu en losange porte fréquemment l’armoirie d’une femme, ou plus rarement, celle d’un ecclésiastique[2].

Émail, n. m. : nom générique donné aux couleurs en héraldique[2]. Les émaux, en nombre restreint et associés selon des règles strictes, se divisent en deux catégories principales, les métaux et les couleurs, auxquelles il convient d’ajouter les fourrures.
Fourrure, n. f. : combinaison d’émaux associés de manière stylisée, destinée à rappeler les pelleteries dont les combattants recouvraient parfois leurs boucliers au XIIe siècle.

Les métaux sont l’or (c’est-à-dire jaune, voir glossaire illustré, n° 1)[4] et l’argent (blanc, n° 2).

Les couleurs sont le gueules (rouge, n° 3), l’azur (bleu, n° 4), le sable (noir, n° 5), le sinople (vert, n° 6), le pourpre (gris-brun, puis rouge-violacé, n° 7), auxquelles s’ajoutent quelques couleurs très rares comme le tanné (brun-orangé, n° 8).

Les fourrures sont l’hermine (n° 9), le vair (n° 11), la contre-hermine (n° 10), le contre-vair (n° 12). Les émaux peuvent aussi être rehaussés d’ornements : le diapré (n° 16) ; le paillé (n° 17).

Couleurs, émaux et fourrures.

L’émail est l’élément essentiel d’une armoirie. En effet, s’il existe quelques armoiries sans figure, il n’en est pas sans émail. Malheureusement, une armoirie doit souvent être représentée sans couleur. À partir du XVIIe siècle, on a essayé de pallier cet inconvénient en élaborant un système de hachures qui n’a pas été suivi d’une manière systématique (n° 1-8).

Figure, n. f. : second élément de composition d’une armoirie après l’émail. Les figures se répartissent en deux groupes : d’une part, les figures géométriques obtenues par des divisions de l’écu où elles occupent une place immuable ; d’autre part, les meubles, qui peuvent être placés n’importe où dans l’écu. Une armoirie sans figure est dite plaine.

Les figures géométriques se subdivisent en deux catégories, les pièces et les partitions.

Pièces, n. f. : figure géométrique obtenue par des lignes horizontales, verticales ou obliques. Elle est posée sur le champ de l’écu et laisse voir celui-ci.

Les pièces les plus fréquentes sont : la fasce (n° 24), le pal (n° 65), la bande (n° 84), la barre (n° 85), la croix (n° 173), le sautoir (n° 174), le chevron (n° 142), le chef (n° 25), le franc-quartier (n° 165), la bordure (n° 127).

Sceau du roi Alphonse X de Castille (1252-1284). Le bouclier et la housse du cheval portent l’écartelé de Castille (un château à trois tours) et de Léon (un lion).
Paris, Arch. nat., sc/D 11247.

Partition, n. f. : assemblage de pièces de même forme et d’émaux alternés, toujours en nombre pair[5] et couvrant entièrement le champ de l’écu.

Les partitions les plus fréquentes sont : le coupé (n° 22), le parti (n° 63), le tranché (n° 80), le taillé (n° 81), l’écartelé (n° 160), l’écartelé en sautoir (n° 161), le gironné (n° 162), le fascé (n° 29), le palé (n° 68), le bandé (n° 89), le barré (n° 91), l’échiqueté (n° 168), le losangé (n° 169), le fuselé (n° 170).

Trait de partition, loc. : ligne d’assemblage des pièces.

Les lignes déterminant les pièces et les partitions sont généralement droites, mais elles peuvent également être courbes (ou ployées, n° 138) ou bien avoir la forme de créneaux (n° 43), de dents (n° 47), d’engrêlures (n° 51), d’ondes (n° 54).

Meuble, n. m. : nom générique donné aux figures dont la place dans l’écu peut être variable par opposition aux pièces et partitions dont la place est fixe.

Les meubles sont de nature très variée : animaux, végétaux, objets divers, édifices. Les plus fréquents sont les « petits meubles héraldiques ». Toujours stylisés, ils peuvent avoir des formes très éloignées des objets qu’ils représentent, tels le besant (n° 220), la fleur de lis (n° 273-274), la rose (n° 226, 356).

Le nombre des animaux utilisés dans l’héraldique n’a cessé de croître depuis le Moyen Âge. Ne sont cités dans le glossaire que ceux qui, par leur nom, leur position ou la particularité de leur dessin s’éloignent des espèces naturelles ou qui présentent des difficultés d’identification. Les autres sont généralement représentés de façon naturaliste, mais l’accent est mis sur les caractéristiques propres à chacun (cornes, bec, dents…) ce qui permet de les reconnaître plus aisément.

Écus aux armes de G. Martel (d’or à trois marteaux de gueules) et du sire d’Alègre (de gueules à une tour d’argent). Armorial Le Breton (1292-1530).
Paris, Arch. nat., AE/I/25/6, fol. 53.

Pour faciliter la reconnaissance des armoiries, la position des meubles sur un écu se fait le plus souvent de manière naturelle. Un bourdon (n° 258), une tour (n° 378) ou un arbre (n° 350-352) est représenté verticalement et un huchet (n° 368) ou un bateau (n° 375-376) horizontalement.

Verrière aux armes d’Angleterre (écartelé, aux 1 et 4, d’azur à trois fleurs de lis d’or ; aux 2 et 3, de gueules à trois léopards passants) autrefois dans l’église Saint-Seurin de Bordeaux (avant 1453).
Bordeaux, Musée d’Aquitaine.

Les animaux représentés de profil ont toujours la tête à dextre. Au cas contraire, ils sont dits contournés (n° 301). La position, les gestes, l’attitude de l’animal ou d’autres particularités peuvent être exprimés par des termes fixés par l’usage : passant (n° 297), rampant (n° 295), issant (n° 300), naissant (n° 299), lampassé (n° 335), affrontés (n° 305), adossés (n° 306), etc.

Les pièces et partitions (n° 22 à 218), animaux et petits meubles héraldiques sont les figures les plus courantes du blason. Une moitié environ des armoiries existantes est composée de pièces ou partitions, souvent accompagnées ou chargées de deux ou trois petits meubles.

[2]  Voir Galbreath, Donald L., Jéquier, Léon, Manuel du blason, Lausanne, 1977, p. 79-90.
[3]  Depuis le XVe siècle, les couleurs portent en héraldique le nom générique d’émail. Bien que l’emploi de ce terme tende à diminuer aujourd’hui, nous l’avons conservé pour éviter l’ambiguïté du mot couleur.
[4] Les numéros renvoient au glossaire illustré de la troisième partie.
[5] Cette règle comporte pourtant une exception : le tiercé (n° 23, 64, 82 et 83)

 

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