Retour au sommaire

LES ARMOIRIES. LECTURE ET IDENTIFICATION

par Emmanuel de Boos

Nouvelle édition en ligne

Première partie : Les armoiries. Notions générales
5. Les ornements extérieurs

Sceau de Guillaume IV, comte de Tancarville (1398). L’écu, supporté par deux lévriers, est timbré d’un heaume cimé d’une tête de bœuf.
Paris, Arch. nat., sc/D 911.

Ornement extérieur, loc. : terme générique donné aux motifs placés autour de l’écu, hors du champ. Les principaux ornements extérieurs sont les casques, les cimiers, les couronnes, les insignes de dignités, les colliers d’ordres, les manteaux, les cris d’armes et les devises. Dans certaines positions, ils sont appelés supports ou timbres.

Support, n. m. : figure placée derrière l’écu ou à côté de celui-ci et paraissant le soutenir. Un support en forme d’être humain est appelé tenant. Les supports apparaissent au cours du XIIIe siècle, d’abord sur les sceaux, mais c’est surtout à partir du XIVe siècle qu’on les trouve en grand nombre. À cette époque, leur taille est encore réduite, mais elle augmente aux XVe et XVIe siècles. Les supports sont généralement des animaux, mais on trouve aussi des personnages, des objets, des plantes, etc. Leur emploi est très libre et n’a guère de caractère héréditaire, sauf dans les familles princières.

Armoiries timbrées de heaumes, cimiers et lambrequins dans l’armorial de Gelre.
Bruxelles, bibliothèque royale Albert Ier, ms. 15652-56, fol. 83v.

Timbre, n. m. : ornement extérieur placé au-dessus de l’écu. Le timbre peut être un casque (aussi appelé heaume), une couronne ou toute autre coiffure évoquant une fonction ou une dignité (tiare, mitre, etc.).

Armoirie timbrée, loc. : armoirie surmontée d’un timbre.

Cimier, n. m. : ornement extérieur qui prend place sur le casque surmontant l’écu. Le cimier est certainement l’ornement extérieur qui a joué le rôle héraldique le plus important. Il représente une figure en relief de taille variable : immense au Moyen Âge, il devient minuscule au XVIIe siècle. Son usage est particulièrement fréquent dans les pays germaniques où il est devenu héréditaire. Les motifs utilisés en cimier sont extrêmement variés : plumes, cornes, vol, demi-vol, tête et col d’animaux, personnage à mi-corps, fleurs, arbres… La vogue des cimiers a été supplantée en France par celle des couronnes vers le milieu du XVIe siècle.

Lambrequin, n. m. : ornement extérieur représenté par de longs rubans contournés et déchiquetés, partant du casque et entourant l’écu. Les lambrequins tirent leur forme d’une pièce d’étoffe, de forme simple à l’origine, destinée à protéger le casque des rayons du soleil. Très tôt, la toile a été découpée en lanières, elles-mêmes redécoupées et dont le caractère décoratif a été exploité par les dessinateurs.

Armes de Gherardo Caccianemici (pape sous le nom de Luc II) surmontées du chapeau de cardinal.
Munich, Bibliothèque d’État de Bavière, cod. icon. 266, fol. 36

Les couronnes sont utilisées dès le Moyen Âge, mais au XVIe siècle, on tente sans grand succès de les réserver aux nobles. Au XVIIe siècle, les théoriciens de l’héraldique essayent d’établir une hiérarchie entre les couronnes et fixent leur forme. Ces règles restent néanmoins irrégulièrement appliquées : durant tout l’Ancien Régime, on constate bien souvent que les roturiers timbrent leurs armoiries d’une couronne de comte ou de marquis et qu’à l’inverse des armes de familles titrées sont dépourvues de timbre.

Insigne de dignité, loc. : ornement extérieur symbolisant une charge ecclésiastique (mitre, tiare, chapeau de cardinal), civile (mortier), militaire (bâton de maréchal), l’appartenance à un ordre ou à une institution. Les insignes de dignité sont des éléments plus instructifs que les couronnes, car, souvent fixés par une autorité, ils sont d’un emploi moins fantaisiste. L’usage des insignes de dignité ecclésiastique : crosses, mitres, chapeaux, a été fixé assez tôt et apporte en général des enseignements utiles . Noter toutefois que le nombre des houppes et cordons des chapeaux ecclésiastiques n’a été réglementé qu’en 1832 et qu’une mitre ou une crosse, quelque soit sa position, ne permet pas de distinguer un abbé d’un évêque. Les insignes de dignité civile sont moins fréquents, car ils concernent principalement les grands officiers et les hauts dignitaires. Ils n’ont été codifiés qu’à partir du XVIIe siècle.

Armoiries de Philippe le Bon dans le codex Ingeram : l’écu est entouré du collier de la Toison d’or et le cri « Monjoie ! » encadre la composition.
Vienne, Kunsthistorisches Museum, A 2302, fol. 62.

Collier d’ordre, loc. : insigne d’un ordre de chevalerie, d’une confrérie ou d’une association. À partir du XVe siècle, il est de plus en plus fréquent d’entourer l’écu de colliers indiquant l’appartenance à un ou plusieurs ordres de chevalerie. Ces colliers permettent souvent de d’identifier le titulaire de l’armoirie. En France, les ordres les plus courants sous l’Ancien Régime sont l’ordre de Saint-Michel et l’ordre du Saint-Esprit. Il existe au Musée de la Légion d’honneur à Paris un important centre de documentation consacré aux ordres français.

Cri d’armes, loc. : ornement extérieur formé d’un mot ou groupe de mots hurlé dans la mêlée des batailles et des tournois pour rassembler les chevaliers combattant sous la même bannière. Il se place en général le plus haut possible au-dessus de l’écu. Le cri est toujours une exclamation : « Montjoie ! » « Dieu aide ! » « Notre Dame Bourbon ! » ou plus simplement un nom de famille : « Châteaubriand ! » « Aubière ! », ou un fief : « Le Chariol ! » « Montmorand ! ».

Le rabot et le niveau, badges de Jean sans Peur, timbrent ses armes sur le sceau commun du comté de Charolais.
Courtépée, Description du duché de Bourgogne, Dijon, 1848, t.3, p.24.

Devise, n. f. : ornement extérieur associant un badge à une sentence.

Badge, n. m. (corps de la devise) : petite figure symbolique, propre à un groupe de personnes ou à un individu, employée ou non en association avec une armoirie.

Sentence, n. f. (mot, âme de devise, devise) : mot isolé ou corps de phrase généralement associé à un badge pour former une devise. Badge et sentence s’expliquent réciproquement. Ainsi, Louis d’Orléans avait une devise formée d’un bâton noueux et de la phrase « je l’ennuie », devise à laquelle Jean sans Peur répondit en adoptant pour badge un rabot accompagné de la sentence « Ik houd » (je tiens) pour signifier qu’il allait raboter les nœuds du bâton. Les devises à deux éléments sont particulièrement nombreuses aux XVe et XVIe siècles. Plus tard, le badge se sépare de la sentence qui reste le seul ornement extérieur et prend alors abusivement le nom de devise.

Emblème, n. m. : au sens technique, image allégorique de caractère didactique, accompagnée d’une sentence et parfois d’un poème explicatif destiné à enseigner une vérité morale . Ne pas confondre emblème et devise, ni emblème et armoirie.

 

Comments are closed.