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Comptes rendus de lecture
Le Grand Armorial équestre de la Toison d’or, édité par Michel PASTOUREAU et Michel POPOFF, Saint-Jorioz, Éditions du Gui, 2001, 2 vol., 20,7×29,7 cm, 685 p., pl. couleur.
Rappelons brièvement que l’ordre de la Toison d’or, institué à Bruges le 20 janvier 1430 par le duc de Bourgogne Philippe le Bon, est l’un des plus prestigieux des ordres de chevalerie médiévaux et aussi l’un des rares qui ont traversé les siècles. C’est cet ordre qui se trouve à l’origine du document édité et qui lui a donné le nom sous lequel les érudits ont pris l’habitude de le désigner, même si une partie des feuillets est sans rapport avec l’ordre lui-même.
Établi de 1435 à 1440 et peint à la gouache sur papier, l’armorial comporte, d’une part, 95 armoiries de familles ou de personnages de toute l’Europe et, de l’autre, des portraits équestres de puissants seigneurs en grande tenue héraldique, dont 34 chevaliers reçus dans les 4 premières promotions de l’ordre. Conservé depuis le XVIIIe siècle à la bibliothèque de l’Arsenal à Paris (ms 4790), ce manuscrit est l’une des plus précieuses sources de l’héraldique médiévale, un des témoins les plus fameux de l’histoire de l’ordre, de la culture chevaleresque dans les cours princières et de la politique des ducs de Bourgogne au XVe siècle.
Une édition, savante en son temps, mais aujourd’hui dépassée, a été donnée en 1890 par Lorédan Larchey, avec la reproduction minutieuse de la presque totalité du manuscrit en chromolithographie. Réalisé dans l’esprit de la fin du XIXe siècle, ce beau fac-similé, plus grand que l’original, a fortement contribué au renouveau de l’intérêt de l’art héraldique en France, comme cela a été le cas pour les travaux d’Otto Hupp en Allemagne. Depuis plusieurs années, le besoin d’une nouvelle édition se faisait sentir. C’est chose faite grâce à Michel Pastoureau et à Michel Popoff et aux Éditions du Gui, avec le soutien du conseil régional de Bourgogne.
L’ouvrage reproduit intégralement et dans le format original le manuscrit de l’Arsenal. Il est accompagné d’un volume d’introduction, d’étude de son histoire et de l’héraldique au temps de Philippe le Bon. Pour la première fois la totalité de l’armorial est édité de manière scientifique : chaque armoirie est blasonnée, identifiée, à part quelques cas peu nombreux et rebelles à toute identification, et chaque représentation équestre fait l’objet d’une notice biographique.
L’excellence de la reproduction du manuscrit est un véritable régal pour les yeux. Elle permet d’admirer la beauté des figures équestres, en particulier la fougue extraordinaire des cavaliers brandissant l’épée, le galop des montures couvertes de somptueuses housses, la fantaisie étonnante des cimiers, certains fort expressifs voire fantastiques, bref, ce style sans égal qui a valu à l’œuvre sa célébrité et qui donne l’impression d’assister à une joute ou un tournoi.
Saluons cette édition qui rend accessible aux héraldistes, aux historiens et au public un des plus beaux armoriaux du Moyen Âge et leur et leur procure une réelle émotion artistique.
Édouard SECRETAN
Extrait de la Revue française d’héraldique et de sigillographie,t. 71-72, 2001-2002, p. 165-166